ARNAUD AREGBA (-81kg)

Comment rester motivé quoiqu'il arrive ?
J'ai toujours adoré toutes les citations, toutes ces choses très inspirantes, beaucoup de chansons par exemple ... C'est un truc qui m'a toujours plu. Je pense que c'est aussi dans mon caractère. J'ai toujours été quelqu'un de très déterminé et très constant surtout.
TRAVAILLER SA TECHNIQUE DANS LE TIMING.
Je dis souvent que pour être fort au judo, il faut surtout faire du judo. C'est surtout dans les randoris que je progresse vraiment mais après, ce que je travaille aussi beaucoup, c'est la technique, sur des détails. J'ai un judo qui est très en réaction. C'est vrai que je mets beaucoup de physique, beaucoup d'impact mais il y aussi beaucoup de réaction. Je vais donc beaucoup travailler sur les sensations que je peux ressentir dans un combat pour vraiment réussir à retrouver les sensations que j'ai pu avoir en randori, essayer de vraiment maximiser chacune de mes "armes". C'est pour ça que, par exemple, parfois, je vais faire de la technique sans forcément y mettre un rythme très élevé. Je suis dans une simple recherche, une pure recherche. Souvent, d'ailleurs, dans les temps de randori aussi je suis dans la recherche. Sur la technique, je vais demander une "opposition" : mon partenaire va se mettre dans une situation précise et je vais vraiment essayer de ressentir le bon moment, ressentir le timing parfait pour pouvoir lancer ma prise. Parce que je pense, honnêtement, que le plus important, dans le judo, c'est le timing. Il y a beaucoup de prises que je ne maîtrise pas forcément à la perfection mais si je les fais dans le bon moment, je pense que ça ira. Il y a beaucoup de prises que je fais beaucoup mieux en randori, que je ne sais pas faire en technique. Ippon-ko par exemple , c'est quasiment mon spécial depuis que je suis jeune et je ne sais pas le faire en technique, je n'ai jamais réussi. Alors qu'en randori, ça coule comme de l'eau, c'est très logique, très facile mais en technique, je n'y arrive pas.
Chuter pour progresser
Je m'en fiche, en réalité, de tomber, ce n'est pas très important. C'est de l'entraînement donc ce n'est pas grave de tomber. En compétition, ce n'est pas très grave non plus. Sur les tournois plus importants, les championnats, c'est vraiment là où il ne faut pas tomber. Dans tous les cas, je vais en compétition pour gagner, sincèrement. Je prépare chaque compétition sérieusement mais maintenant, je garde quand même en tête que chaque compétition reste de l'entraînement. Par contre, les championnats, là, ce n'est pas de l'entraînement, c'est différent. C'est pour ça que, parfois, je ne prends pas forcément en compte le résultat. Je vais plutôt prendre en compte ce que la compétition m'a apporté. Par exemple, là, sur le Grand Slam de Paris, le constat que je fais, c'est que malheureusement, je fais 5. Ça reste donc un échec parce que je ne suis pas sur le podium mais ce que je vois surtout, c'est que j'ai pris les numéros 2, 4 et 5 mondiaux et que j'ai pu me tester en situation réelle sur des mecs comme ça. C'est ça le plus important. Si je dois perdre sur tous les tournois pour être prêt sur le championnat, si je dois faire 5è, 5è, 5è, 3è, 5è et que je suis champion du monde, moi ça me va !
CÉDRIC REVOL (-60 kg)

Comment TRAVAILLER SEOI À GENOUX ?
Il faut réussir à aller vraiment très profond, tout en gardant le contrôle en haut.
Un exercice que j'aimais bien faire, c'était de demander à mon partenaire d'écarter les jambes le plus possible, vraiment très écartées, donc c'était presque impossible d'aller en dessous.
J'essayais vraiment de mettre mon pied comme en haut du triangle et d'aller plonger en dessous, le plus loin possible, et vraiment d'accentuer. Comme il est très bas, ça m'oblige à vraiment faire l'effort d'aller en dessous et du coup, après, en randori, les mecs sont forcément un peu plus élevés et donc je vois le trou plus facilement.
À chaque fois en fin de séance, je demande à mon partenaire de se mettre vraiment le plus écarté possible et je vais aller plonger en dessous. Je le fais toujours régulièrement.
En uchikomi, je fais les deux : debout et aussi à genoux (profond). Quand on fait morote, pour qu'il sorte en compétition, il faut aussi s'entraîner en uchikomi à genoux. C'est sûr qu'on ne peut pas suivre le rythme des séries comptées quand on va à genoux mais ce n'est pas grave. On fait bien son seoi, on va en dessous. Le partenaire peut bloquer un peu pour ne pas être trop emporté mais il faut le faire aussi comme ça. Et il faut toujours travailler. Ça peut être aussi la manière de l'amener, de surprendre. Même les points forts, il faut toujours les travailler, il faut les maximiser.
MANON DEKETER (-63 kg)

ANALYSER, visualiser ET RÉPÉTER pour progresser
Pour moi, la clé, c'est la répétition. C'est répéter, répéter les mouvements qu'on fait pour mieux réussir. Souvent, on répète aussi après l'entraînement par rapport à ce qu'on a fait pendant les combats, ce qui ne va pas ou ce qui a bien marché, voire ce qu'il faut retravailler ou ce qu'il faut perfectionner.
Ce qui est bien, c'est de faire une analyse après l'entraînement pour déterminer les points positifs et les points négatifs à travailler. J'ai la chance d'avoir les entraîneurs à côté de moi, qui, eux aussi, ont une analyse différente vu qu'ils sont à l'extérieur. J'ai cette chance-là de pouvoir avoir leur avis mais, sinon, je le fais moi-même. Je fais beaucoup de visualisation après les entraînements pour répéter les matchs. Pas forcément sur tout parce que, du coup, c'est long mais par exemple sur un stage international comme là, c'est important d'analyser mes combats car ce sont des filles que je vais rencontrer plus tard.
Si mon kumikata a péché, ça va être des répétitions sur kumikata ; si c'est une technique qui a péché, ça va être davantage sur ça. C'est vraiment en fonction du ressenti et de ce qui n'a pas été durant le combat. Et mes uchikomi, répétitions ou visualisations, ça peut être sur plein de choses.
ENZO JEAN (-60 kg)

S'amuser pour devenir fort au sol
Au début, je n'aimais pas trop le sol. C'est venu par des amis qui travaillaient bien au sol. C'est aussi venu par le MMA, le grapping... tout ça. Je suis un grand fan des sports de combat en général et, du coup, ça a commencé à m'intéresser.
Avec mes amis, petit à petit, on a commencé à travailler au sol ensemble. Et pour progresser au sol, on peut essayer de diversifier son travail, notamment en retirant sa veste et en faisant du grapping sans haut de kimono par exemple. Il faut vraiment kiffer travailler au sol, prendre du plaisi
Au début, comme je n'aimais pas ça, je voyais ça comme une corvée et je n'étais pas bon. Mais ensuite, j'ai commencé à voir ça un peu comme un truc cool qui change du judo. J'enlève mon kimono, on fait du grapping, parfois on fait de la lutte... c'est comme ça que j'ai kiffé le sol.
RÉPÉTER son spécial liaison DEBOUT-SOL
Ce qui est important, c'est de beaucoup suivre au sol durant les combats de tachi-waza parce que les combats de ne-waza ne sont pas très représentatifs du sol en compétition. Et en compétition, l'idéal est aussi de se forcer, à chaque séquence, de suivre au sol.
Ensuite, il faut essayer de faire des uchikomi sur ses spéciaux. Il vaut mieux avoir un ou deux "spécial" au sol et ensuite quelques mouvements qui gravitent autour. On peut les répéter, les répéter... Je sais que mes mouvements au sol, je les ai répétés énormément dans plein de positions différentes.
À la fin des séances, parfois, je prends un ami et je lui dis : "viens, on répète plein de liaisons debout-sol". On les répète ensemble, je mets un petit coup de patte et ensuite, direct, je plonge et je fais une liaison debout-sol. Je pars toujours de debout mais pas forcément avec une technique.
En général, je n'ai pas plus de trois mouvements. Je les répète et après, j'essaie de les mettre en application durant les combats et en compétition. L'idéal, ça reste quand Uke est à quatre pattes et que, direct, je prends son dos. C'est le plus important. Ensuite, je prends mon temps, je travaille.
MELKIA AUCHECORNE (-63 kg)

Faire ce qu'on n'aime pas faire !
Je n'ai pas d'exercices précis ou magiques mais je sais qu'il faut bien identifier ses points faibles et insister dessus. Il faut aller dans les trucs qu'on n'aime pas faire. Il y a plein de choses que je n'aimais pas faire : par exemple, je n'aimais pas du tout les prépas et bien, je me forçais à les faire.
Alléger ses entrainements avant une compétition
On allège un peu la semaine avant la compétition. Souvent, pour beaucoup, on est au régime et puis, de toutes façons, ça ne sert plus à grand-chose de se mettre beaucoup de pression. Il faut rester concentré, ne pas se blesser et donc on allège beaucoup.
MAXIME GOBERT (-73 kg)

monter de catégorie
En 66, j'étais performant mais je ne faisais pas particulièrement chuter, j'étais plus dans la tactique. En 73, ça ne fonctionne plus forcément parce qu'ils sont un peu plus "volumineux". Du coup, il faut avoir davantage de techniques fortes et c'est de cette manière-là que j'ai changé un peu mon judo, de manière à faire plus tomber. C'est déjà un travail à l'entraînement et ensuite, en compétition, il faut accepter de prendre des risques et d'attaquer. C'est là-dessus que j'ai changé. Bien sûr, ça se travaille.
Quoi faire quand on est mené de wazari et qu'il reste peu de temps ?
J'essaie de monter un peu crescendo, c'est-à-dire que je ne vais pas directement me précipiter sur l'adversaire mais plutôt augmenter la pression, petit à petit, pas tout de suite. Je me dis que, là, il faut me bouger et être un peu plus agressif sur les mains, prendre un peu plus de risques pour lui faire faire des erreurs. Et quand il fait des erreurs, il faut être opportuniste pour les saisir.
Après c'est vrai que, quand il reste 15 secondes, il faut tout donner sur une attaque, surtout quand il n'y a pas de shido de son côté. Il faut prendre des risques au maximum.
Travailler différemment ses techniques selon le type d'entrainement
J'essaie d'avoir un spécial, une technique forte de chaque côté, sur gaucher, sur droitier ... Que ce soit des attaques fortes pour faire tomber. Je n'ai pas une palette technique très élevée non plus mais c'est vrai que j'essaie d'avoir une technique à gauche et une à droite, sur droitier et sur gaucher. Je vais travailler sur une technique en particulier durant une semaine, en insistant sur ça en uchikomi ou en randori... Et d'autres semaines, ce sera autre chose. Ça dépend vraiment des jours et des semaines. Il y a aussi des semaines où on est plus fermé sur les mains, où on est plus "en compétition" et là, on est un peu moins ouvert.
Durant ce Training Camp du Paris Grand Slam, on est plus ouvert qu'en compétition parce que la compétition, c'est particulier. On ne montre pas tout mais on reste ouvert pour essayer de progresser même si on prend des risques. L'entraînement et la compétition, c'est vraiment deux choses différentes.
MARTHA FAWAZ (-57 kg)

Accepter son stress pour tout donner
Ce qui a beaucoup joué dans mes années plus jeunes et qui m'a desservie, ça a été le stress. Quand on est sportif de haut-niveau, si on a du stress, il faut que ce soit du stress positif. Sinon, c'est ce qui nous fait passer à côté et nous fait avoir des regrets et c'est une sensation horrible, d'avoir des regrets.
Il faut alors faire un travail sur soi : c'est OK d'avoir peur d'échouer. Moi, le cap que j'ai passé avant Paris, c'est que je me suis avoué à moi-même que, oui, j'avais peur de passer à côté. Le sentiment de peur, il ne faut pas essayer de le renier, il faut l'accepter. On a tous peur de quelque chose et en fait, c'est un sentiment qu'il ne faut pas essayer de fuir. "Oui, j'ai peur ... maintenant, est-ce que je vais me battre ? oui." C'est ce déclic-là, tout simple en fait, où je me suis dit : "Oui j'ai peur d'échouer, j'ai peur de ne pas y arriver mais je sais que je vais me battre". J'étais stressée mais quand je suis montée sur le tapis, je savais que j'allais tout donner.
Ce qui aide beaucoup aussi, c'est la répétition de compétitions : on a nos habitudes, nos repères. Enchaîner les compétitions à haut niveau, c'est vrai que ça aide parce que du coup, on n'a plus la sensation du nouveau. La peur vient quand c'est un peu nouveau.
Le Tournoi de Paris, je l'ai fait deux fois mais c'est toujours nouveau dans le sens où c'est un Grand Slam avec beaucoup de public. C'est cette sensation de nouveau et c'est la peur d'avoir beaucoup de regards que j'avais aussi. Ce n'est pas pareil quand on fait une compétition et qu'il n'y a personne. Là, j'avais plus la pression et je l'ai totalement acceptée. C'est comme ça que j'ai réfléchi pour passer ce cap.
Les liaisons debout-sol dès l'échauffement
Ce que j'aime beaucoup, c'est tout ce qui est liaison debout-sol, c'est à dire qu'après avoir fait tomber, ramener au sol pour pouvoir marquer. C'est très important surtout avec les nouvelles règles de maintenant. J'aime bien quand on axe un peu l'échauffement sur les liaisons debout-sol où le partenaire est à genoux et on doit le faire tomber (même s'il est à genoux) pour enchainer au sol. Ça échauffe et on répète les gammes en même temps. Si c'est l'échauffement, j'essaie de répéter vraiment ce qui est en lien avec mon judo. C'est vraiment de la répétition des gammes avant l'entrainement. Pendant les séances techniques par contre, j'essaie de tester des nouvelles choses et de voir ce que je peux inclure dans mon judo, si ça me correspond...
ROMARIC BOUDA (-66 kg)

Comment gérer un temps d'attente durant un combat en compétition ?
On peut se retrouver à attendre assez longtemps, parfois, en plein combat. Si l'adversaire saigne par exemple et qu'il doit se faire soigner... Ce sont des moments qui me sont déjà arrivés dans le passé et je n'ai pas travaillé spécifiquement dessus.
Mais j'ai la chance de pouvoir très souvent avoir mes coachs sur le côté qui me parlent pendant ce temps-là donc ça me permet, déjà, de rester toujours actif mentalement, même si physiquement il y a une pause. J'écoute les consignes et ça me permet tout simplement de "rester dedans". J'essaie aussi, de mon côté, une fois que j'ai pris les consignes, de me répéter un schéma mental de la reprise, de la séquence qui va suivre. Mon schéma mental reste le même. Si je suis mené, je schématise comment je vais reprendre la séquence pour justement essayer de marquer et rattraper ce retard et si c'est moi qui mène, je me répète également la séquence : comment je dois faire pour ne pas me faire rattraper, étant donné que j'ai de l'avance, et marquer si l'occasion se présente pour terminer le combat. Ça aide à ne pas se dissiper et à ne pas s'éparpiller trop parce que parfois, c'est là qu'on sort du combat.
Imposer son kumikata de gaucher
Dans l'idéal, je travaille avec le kumikata que je préfère, c'est à dire à l'intérieur lorsque je suis en garde opposée. L'idée, pour moi, c'est d'imposer à l'autre le changement et ne pas m'adapter à l'autre. C'est comme ça que je vois les choses. Après, bien évidemment, dans le combat, il y a des moments qui font qu'on n'est pas toujours à l'intérieur donc il faut aussi faire preuve d'adaptabilité parce que, si je suis à l'extérieur, ce n'est pas pour autant que je dois estimer que je suis perdant sur la séquence. Je dois me "débrouiller" pour repasser à l'intérieur, ça ne doit pas me pénaliser au point de perdre la séquence. Idéalement, mon objectif premier, c'est toujours de m'imposer moi et de ne pas subir.
Ensuite, je peux travailler plus spécifiquement, non pas sur des randori entiers mais plutôt sur des séquences. J'essaye de me retrouver dans cette situation-là et de trouver ce que je ferais en combat, en compétition tout simplement. J'essaie de trouver des petits tips à l'entraînement mais je ne me focalise pas principalement là-dessus.
Avoir différentes techniques sur gaucher ou droitier
Sur gaucher, je n'ai pas les mêmes techniques d'attaque que sur droitier. Je ne l'ai pas réfléchi mais je l'ai développé comme ça, avec le temps. En fait, je ne peux pas faire les mêmes attaques sur gaucher ou sur droitier parce que l'espace que j'ai pour attaquer sur gaucher n'est pas le même, donc j'ai des techniques différentes. J'ai deux schémas en fonction des droitiers et des gauchers principalement mais là où je ne "change" pas, par contre, c'est sur les mains. Là, j'ai toujours le même schéma : être dominant sur la manche, que ce soit en droitier ou gaucher, et le revers si c'est sur droitier ; être dominant sur gaucher, c'est faire en sorte que j'ai la main au revers mais que lui n'ait jamais la manche avec moi en même temps. C'est un peu mon schéma. Il y en a qui sont à l'aise autrement mais moi c'est comme ça que je développe mon judo.
MERCI
à vous, chers judokas, pour avoir pris du temps sur votre "Training Camp" du Paris Grand Slam afin de partager votre expérience au plus grand nombre !

Retrouvez le 1er épisode de "L'équipe de France judo partage ses meilleurs conseils pour progresser" en cliquant ici (enregistrement durant le Training Camp du Paris Grand Slam 2024).

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