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Temps de lecture : 8 min

1- Quand tu crois que ce n'est pas grave...
2- Chaque tatami à sa place !
3- Dans les couloirs de l'hôpital
4- Rebondir

Quand tu crois que ce n'est pas grave...


CRAC


"Randori !". 

C'est mon moment préféré. J'accepte l'invitation d'une judoka que je connais pas, avec plaisir. Au "Hadjime", je me fais surprendre en quelques secondes seulement : elle me saisit très fortement le kumikata, lance sa technique, ippon. C'est une jeune compétitrice, je comprends immédiatement qu'elle ne va pas me proposer un randori pour travailler souple... et qu'elle a plutôt envie de se confronter. Je n'aime pas ça en club mais je n'ai pas envie de me dégonfler. Je me relève donc et c'est parti : je tente de lui faire face. Quelques actions plus tard, je chute le bras tendu au-dessus de ma tête, dans une hyper extension, et ça fait crac dans l'épaule.


Aïe

J'ai continué 2 randori après celui-là. La douleur commençait à se répandre dans tout le bras, jusqu'à la main. J'ai fini par refuser le randori suivant, la mort dans l'âme. D'ailleurs, en regardant les judokas depuis le bord du tatami, je regrettais de l'avoir refusé : j'aurais pu faire un effort et finir l'entrainement quand même. Ça, c'est quand tu n'as pas envie de comprendre que tu t'es blessée malgré tous les signaux !


Optimisme

Vestiaire, douche, apéro avec les copains.... Je commençais à ne plus pouvoir bouger le bras. Je connais un peu mon corps même si j'ai eu très peu de blessures. Je sais que ça ne sera pas parti demain matin au réveil. Mais, comme s'il était impossible de l'admettre, j'ai tout de même bon espoir. J'ai toujours eu de la chance, si ça se trouve, demain, ce sera quand même passé. Et sinon, ça sera l'affaire de quelques jours, pas de problème. C'est la phase de déni qui commence...


La phase de déni

J'ai appris que la réaction d'un sportif à une blessure peut suivre les mêmes phases que celles du deuil. Et effectivement, quelques jours après ce crac, je réalise que j'étais dans le déni. Ça m'a intéressée de savoir que c'était une attitude presque "physiologiquement inévitable", en tout cas "normale". Ça m'a évité de me dire que j'étais vraiment trop bête ce soir-là !

Une étape utile !


Le déni, ce n'est pas quand tu refuses consciemment de voir les choses en face... C'est quand tu ne réalises pas ! Quand ton cerveau ne remarque pas tous les signes. C'est comme quand tu vois ta voisine passer dans la rue mais que tu ne la reconnais pas. Tu la vois vraiment, mais ton cerveau ne fait pas la connexion. C'est pareil !


Cette réaction est super utile : elle permet d'éviter un choc trop brutal duquel on ne se relèverait peut-être pas. Le cerveau crée des illusions qui compensent les signes qui lui arrivent. C'est un peu le gros tapis de chute qu'on utilise pour avoir moins mal, comme une étape intermédiaire aux vraies chutes sur tatami.


Signal 👉🏾Je ne peux plus bouger le bras

Création d'illusion 👉🏾 peut-être que demain ça sera passé.


 

PLEURS


"Allô ?"

Retour en voiture. Passage de vitesse de la main gauche. Parking. Téléphone. J'appelle mes tout proches, autant pour les prévenir que pour me confier.

La phase de déni continue et je dirais même qu'elle fait magnifiquement son travail : je pleure parce que je suis maintenant sûre que ça n'ira pas mieux demain matin. Je réalise donc que ma semaine de judo est a priori annulée et que je vais manquer un peu de préparation pour ma compétition prévue dans 10 jours. Parce que bien sûr, ça sera passé d'ici la compétition 😉 


Culpabilité et colère

Les phases 2 et 3 s'enclenchent, parallèlement à mon déni toujours en action.

Je pleure fâchée contre cette jeune compétitrice qui n'a pas fait randori de travail autant que contre moi qui aurait dû l'arrêter tout de suite. C'est la phase où on veut revenir en arrière, recommencer depuis le début. C'est aussi intéressant de savoir que c'est une phase classique parce que sur le coup, on s'en veut d'être dans cet état.

L'impuissance que l'on ressent parce qu'il est impossible de revenir en arrière se traduit par un sentiment d'injustice.

"Pas de chance !", "Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ?". C'est super désagréable de ne pas pouvoir revenir en arrière en fait 😅 Alors être fâchée, contre l'autre ou contre soi, ça aide à masquer cette sensation d'impuissance. Ça donne une émotion forte à vivre. Certains diront "vider son sac", d'autres "tout lâcher". 

Se protéger


La colère est l'une des émotions les plus condamnées de la société. Normal : elle est presque toujours exprimée de façon compulsive, c'est-à-dire sous des formes très gênantes, voire dangereuses, pour l'entourage. Du coup, on met dans le même paquet l'émotion elle-même (la colère) et la façon dont elle est exprimée. Et la conclusion est simple : "ce n'est pas bien d'être en colère !"

Pourtant, j'ai fait une découverte passionnante en 2020. C'était après l'explosion de Beyrouth que j'ai vécue de plein fouet. Je n'arrivais pas vraiment à retrouver la joie dans les mois qui ont suivi... et j'ai donc consulté une spécialiste de ce type de traumatisme. J'ai pu alors ressentir combien la colère est une énergie vitale de protection. Lorsque cette émotion circule sainement dans le corps et au bon moment, ça permet vraiment de sauvegarder son intégrité physique et morale. Une colère qui dit non à l'extérieur, c'est une colère qui dit oui à soi.


Ce soir-là, ma colère contre Uke et contre moi-même était produite par mon corps et mon cerveau qui voulaient dire 👉🏾 "Danger ! À ne pas reproduire ! Tu tiens à ta santé ! Tu tiens à ton judo !". Et ça, c'est important !


ÊTRE BIEN ENTOURÉ


Comprendre pour accepter

Il faut comprendre que lorsqu'on parle de phases, ça ne veut pas dire que ce sont des étapes chronologiques qui s'enchainent bien dans l'ordre. Tout peut se vivre en même temps, de façon mélangée, repartir et revenir. Les phases de la blessure (du deuil) sont définies pour simplement nous apporter la compréhension de nos ressentis qui surgissent sans qu'on les maîtrise toujours.

Personnellement, comprendre m'aide à accepter mes réactions sans les juger. Je trouve qu'on a vite fait de s'en vouloir, de ne pas se sentir normal, de s'obliger à être mieux ou différent... Et c'est parfois renforcé par l'entourage qui nous donne mille conseils sur comment on devrait réagir !

"Repose-toi, c'est un appel de ton corps",
"Allez, positive, ça va repartir !".
"Franchement, tu vas arrêter le judo, là, quand même ?"
"Tu reviendras plus forte, et dans pas si longtemps !"


Tous ces mots qui n'aident pas forcément...

Au moment de la blessure et juste après, toute la famille et les amis prennent des nouvelles et nous abreuvent de conseils, ce qui témoigne de leur attachement d'ailleurs. C'est touchant et important de se sentir entouré dans ces moments-là. Cela dit, cela peut aussi être très vite déstabilisant.

Il y a ceux qui vont être effrayés de la blessure, ce qui peut nous faire douter et provoquer davantage d'inquiétude.

Il y a ceux qui vont nous dire tout de suite comment ça s'est passé pour eux ou pour le cousin de leur voisin, ce qui nous incite à créer cette information comme une référence, un point d'attache, de repère... alors qu'elle n'est sûrement pas vraie pour soi. 

Il y a ceux qui vont nous dire de rester positifs, que ce n'est pas grave etc., ce qui accentue le sentiment de ne pas être à la hauteur si on est dans une phase basse.

Que dire pour soutenir un blessé ?


Personnellement, ce qui m'aide le plus, c'est :


- l'écoute toute simple. Eh oui ! Ne pas dire grand-chose, voire rien du tout, mais prendre le temps pour écouter dans quel état se sent le blessé, sans juger ses émotions justement. Si le blessé est triste, inquiet, ou énervé, on le comprend. Ce n'est pas agréable, on aimerait le sortir de cet état. Mais pourtant, souvent (pas toujours), c'est l'état dont il a besoin à ce moment-là. Et l'écouter, c'est l'aider à accepter ses émotions.


- les questions toutes simples. Les petits "Comment ça va aujourd'hui ?" sont tellement utiles ! Ils marquent une présence, une attention, avec toutes les portes ouvertes pour la réponse... Le blessé qui aura envie d'échanger pourra le faire, et celui qui n'aura pas trop envie pourra aussi répondre plus brièvement !


- les pensées toutes simples. Quand j'entends des amis me dire "courage, tu sais qu'on est là". "allez, patience, ça va aller...", cela m'aide ! C'est à la fois une reconnaissance de cette période difficile et une discrète invitation à surmonter la difficulté, à son rythme.


Rester pilote de son avion

Lorsqu'on a conscience de tous ces types de réactions possibles dans son entourage ET lorsqu'on connait "les phases" qui permettent de comprendre et accepter ses réactions, alors on peut se sentir soutenu quoiqu'il arrive 😁! On est capable de recevoir l'affection qui se cache derrière la phrase inquiète ou maladroite. On entend les informations données par les copains sans croire que ce sont des vérités absolues.

Globalement, on entend tout, on le mouline pour en faire un soutien précieux, et on avance à l'intérieur de soi. On est aux manettes, pilote de son avion.

Tableau de bord d'un avion

Je me souviens de mon père face à son tableau de bord aux mille boutons et informations. Tout me paraissait si compliqué, il y en avait partout ! Mais lui, qui connaissait bien, ne regardait que 3 ou 4 indicateurs. Il savait lesquels étaient utiles selon les moments, voilà tout. 


Les soutiens de tout l'entourage, c'est pareil. Si on s'y connait (j'espère que cet article aidera !), on comprend alors qu'ils sont tous importants, mais qu'on est libre de prendre ceux qui nous sont utiles au bon moment.

Merci les amis

Besoin d'écoute ? Merci Philippe ! 

Besoin d'une pensée ? Merci Alissia 😁 

Recherche un coup de boost... Allô Nico ?

Informations pas rassurantes ? Ok je note quelque part... J'ai rendez-vous demain avec le chirurgien, on verra ce qu'il dit !

Coup de mou, besoin d'aide ... Coucou Jean-Luc !

Besoin de juste craquer ! Ouf, Laëti est là...

Etc.

Alors à tous les judokas, quand quelqu'un est blessé, pensez que vous pouvez faire partie de son tableau de bord... Et que ça lui sera potentiellement très très utile au bon moment, donc ne restez pas loin 😉


Leçon 1 : chaque tatami à sa place


Docteur ET judoka !


Le lendemain de la blessure, je n'étais pas très motivée pour aller voir un médecin. C'est toujours long d'obtenir un rendez-vous et qu'allait-il me dire ? Je savais que c'était musculaire donc dans tous les cas, je n'avais rien d'autre à faire que mettre du froid, de la crème, boire, manger des vitamines, patienter... Simple quoi 😅

À ce moment-là de l'histoire, la vie a été particulièrement généreuse puisqu'elle a fait en sorte qu'un médecin urgentiste pratique dans le club de judo non loin de là où j'étais, sur la route ! Il a regardé quelle mobilité j'avais, ce qui a été rapide puisque je n'en avais aucune. Quand il m'a recommandé de passer une échographie, j'entrais sur la fin de la phase de déni. Je comprenais que c'était sérieux et je me doutais que je ne pourrais pas faire ma compétition 10 jours plus tard. J'étais prête à le reconnaitre. Ma culpabilité et ma colère se sont transformées en leçon à tirer.


Un accident, ça ne tombe pas du ciel.

Mon esprit s'est éclairci et j'ai pu "relire" ce qui s'est passé. J'ai alors vu une erreur majeure que je faisais depuis quelques semaines. Ce n'est pas une erreur tombée du ciel, mais la conséquence logique de réactions en chaine. J'ai remonté le fil jusqu'au départ et c'est limpide.

👉 j'avais pour cette saison 2021-22 des objectifs clairs, je les avais posés.

👉 conséquence logique : j'ai mis les moyens en place pour les atteindre, déterminée, et je n'ai reculé devant rien.

👉 parmi ces moyens, je décide d'aller à l'INJ* le lundi soir, accompagnée par un ami coach qui s'occupe de moi

👉 je progresse énormément grâce à son analyse précise et totalement personnalisée. Cela me motive à travailler encore plus, avec des exercices en solo le matin. Je me sens en pleine forme physique.

👉L'INJ me fait aussi évoluer mentalement. Je monte ma capacité à affronter l'adversité. Je chute fort et beaucoup : mon "seuil d'encaissement" augmente pas mal. Je me sens en pleine évolution mentale et j'aime ça.

👉Enfin, je continue de pratiquer dans de nombreux clubs à travers la France, tous tellement accueillants. Avec le temps, je m'habitue vraiment à rencontrer des judokas que je ne connais pas, je n'ai plus aucune appréhension.

C'est dans cet enchainement de progression technique, physique et mentale côté compétition que récemment, j'ai accepté, en club, des "randori" avec des jeunes, inconnus, qui avaient envie de voir s'ils pouvaient me mettre par terre. Très bêtement, sans m'en rendre compte, j'ai accepté de rentrer dans ce jeu et j'ai "résisté". J'ai donné de l'opposition, j'ai essayé que la tâche ne leur soit pas facile. Je connaissais l'INJ, ce n'est pas ça qui allait m'effrayer...


L'erreur majeure de croire que tous les tatami se ressemblent.


Sauf que l'INJ et les clubs, ce sont deux mondes différents. Des pratiques qui n'ont rien à voir parce que ce ne sont pas les mêmes judokas ni le même encadrement. Moi, j'ai tout mélangé. Je n'avais jamais réalisé que les tatamis ne se ressemblaient pas. Aujourd'hui, cela me parait évident.

L'INJ

À l'INJ, je ne me suis jamais sentie en danger. J'attribue cela à 3 raisons :

- les filles n'ont absolument rien à prouver. Elles sont là pour travailler et ne cherchent ni plus ni moins.

- les judoka ont un niveau qui fait que leur judo est très propre. Ils savent ce qu'ils font. Certes, c'est du costaud, mais c'est pas du n'importe quoi.

- bonus pour mon cas : les trois quarts des filles que j'ai rencontrées et qui étaient largement au-dessus de mon niveau ont "pris soin" de moi et se sont, mine de rien, adaptées.


Ton club d'appartenance

Dans les clubs où je pratique régulièrement (merci Saint Clém, Ailly, Ippon5, Gant d'Or, JC Cellois, Sanshiro, Kogakukan...), le lien humain existe : on se connait parce qu'on pratique ensemble souvent. Cela ôte toute envie de "prouver" quoi que ce soit. Les randori sont largement sécurisés dans ce cadre... Et je trouve que c'est d'autant plus visible lorsqu'on est une féminine de 50kg face à de grands adolescents de 16, 18 ou 20 ans, en pleine prise de masse musculaire. Plutôt que de voir une ceinture noire qui a gagné tel championnat et qui "doit sûrement être forte", ils voient la personne humaine qui travaille son judo, et avec laquelle ils passent de bons moments en dehors du tatami. Ainsi, dans ces clubs, j'ai parfois l'impression de pouvoir donner mon maximum, même avec des jeunes, sans pour autant me mettre en danger.


Les clubs techniques

Bien sûr, il y a de nombreux clubs qui ne préparent pas à la compétition. Ils pratiquent donc, d'office, des randori souples, de sensations, techniques. Cela n'empêche pas d'être vigilant avec les poids supérieurs, surtout s'ils sont ceintures de couleur, car il peut arriver que certains ne maitrisent pas leurs techniques et soient dans un état d'esprit qui ne sécurise pas totalement le randori... Mais il est vrai que sur ce type de tatami, généralement, la pratique se fait avec le plaisir de l'échange et de la progression mutuelle, dans un bon esprit.


Les clubs compétiteurs

Lieu du crime 😂 C'est là que j'ai compris, au prix d'une épaule, que chaque pratique avait sa place. Je ne pouvais pas faire le judo de l'INJ dans les clubs, avec des judokas inconnus dont je ne connais ni le judo ni l'état d'esprit. La règle, désormais, pour ces clubs que je visite, c'est :

- expliquer clairement que je pratique le randori et non le combat de compétition durant l'entrainement

- privilégier les judokas vétérans ceintures noires car ils ont la maturité et l'expérience judo

- stopper tout combat qui ressemble à une compétition.

Et je crois, personnellement, que c'est de ma responsabilité individuelle que d'adopter ce type de règle. Si, en plus, j'ai l'occasion de l'expliquer, ce peut être une chance pour le.la jeune de comprendre cette approche mais ce sera un bonus. Mon rôle premier, égoïste mais essentiel si je veux atteindre mes objectifs, est de suivre une ligne de conduite stricte.

Réactions en chaine : suivre le fil.

J'ai partagé ici mon histoire, mon cas personnel. C'est vraiment à prendre comme un exemple et non comme une vérité générale. Chacun trouvera ses propres règles car chaque histoire, chaque pratique, chaque approche est différente. Ici, je souhaite simplement montrer comment il est possible de retracer le paysage dans lequel l'accident s'est produit et d'en tirer un enrichissement pour sa pratique. 

En prenant ce temps de recul, des liens de causes à effets se tissent. On augmente la compréhension de son propre parcours, de sa pratique, et on peut alors développer de nouveaux outils pour l'avenir, dans l'idée d'encore et toujours progresser d'avantage... Améliorer sans cesse son cadre de pratique (que ce soit par le type d'entrainement, les règles que l'on s'impose, les dépassements que l'on va chercher etc.) fait partie de ces outils incontournables.


Les couloirs de l'hôpital


Rupture totale du tendon

Grâce au médecin urgentiste, j'ai pu passer une échographie au CHU. Aujourd'hui encore, j'ai beaucoup d'empathie pour le médecin de l'échographie qui a dû se résoudre à s'arrêter sur la tâche noire de l'écran et prononcer le mot "rupture" 😅. J'ai bien vu qu'il était embêté... parce que lui-même avait parfaitement vu que j'étais à des années-lumière de m'en douter ! D'ailleurs, même quand il me l'a dit, je n'ai pas encore bien compris.

C'est juste après, quand le judoka-médecin-urgentiste a prononcé le mot "opération" que je n'ai pas pu éviter la réalité. Le choc ! Il faut dire que je n'ai jamais été hospitalisée de ma vie donc, c'est comme pour tout, lorsqu'on n'a aucune expérience, le moindre mot peut être impressionnant.


L'encadrement médical

Il ne me serait pas possible de partager toute cette histoire sans mentionner l'incroyable qualité des équipes médicales de cet hôpital, le CHU de Bergerac. Chaque médecin, chaque assistante, chaque infirmière, chaque administrateur.trice a été d'une disponibilité et d'une douceur qui m'étonnent encore. Comme j'y ai passé 2 jours complets, dans différents services (écho, IRM, chirurgie, anesthésie, urgences...), et que j'étais seule, je peux vous dire que ça a compté ! C'était même le plus important ! Ces équipes médicales ont accompagné mon crash en direct, depuis ma tour d'illusions qui était en fait assez haute 😅 Un spécial merci au judoka-médecin-urgentiste... et au chirurgien qui va me découper l'épaule 😖!


Opérer l'épaule


Comprendre parfaitement un IRM, c'est assez fou... C'est ce qu'a réussi le chirurgien qui va s'occuper de moi. Il est papa d'un jeune judoka en pôle espoir, ce qui me laisse penser qu'il comprend l'importance que peut avoir mon épaule dans ma vie 😅 J'ai décidé de partager avec vous ce que j'avais compris de la lecture de l'IRM parce que ça peut vous intéresser pour vos propres épaules !


Acromion type 1, 2 ou 3 ?

Votre type est héréditaire : 

- les 1 ont un acromion "plat" qui ne va pas du tout embêter le tendon supra-épineux

- les 2, comme moi, ont un acromion qui pique un peu en crochet et qui touche, de ce fait, le tendon. Celui-ci est en légère souffrance, et notre épaule est plus sujette aux fragilités.

- les 3 ont un acromion qui crochète totalement le tendon supra-épineux, lequel est clairement en souffrance. Les personnes qui ont toujours des problèmes d'épaules sont généralement de type 3.

Muscle atrophié ?

Si votre tendon est en souffrance, le muscle va vouloir le protéger. Pour cela, il va s'empêcher de se développer pour laisser de l'espace au tendon, pour ne pas le toucher et l'embêter d'avantage. C'est l'enveloppe blanche que l'on voit sur l'IRM...


Rupture transfixiante

Nous avons 4 tendons dans l'épaule. Pour moi, c'est le "supra-épineux" (qui est au-dessus donc) qui a été touché. Transfixiante, ça veut dire qui transperce, donc c'est rupture totale. La "cassure" peut être toute droite ou en oblique comme c'est mon cas. Apparemment, cette blessure est fréquente et se répare bien. Je vous en dirai plus dans quelques mois !


L'opération

Chaque cas est unique. Dans le mien, le chirurgien va couper un peu l'acromion pour libérer le tendon. Cela permettra au muscle de reprendre tout l'espace (attention, je vais devenir très forte du bras droit 😂). Il va également planter dans l'épaule une petite vis avec des fils qui vont rattraper le tendon et le raccrocher correctement. C'est sur 17 mm, ça me parait énorme 😲 


Rebondir


Planifier, s'adapter, se projeter, changer, maîtriser...


Comment fonctionnez-vous ?

Plus on se connait, plus il est "facile" de vivre n'importe quelle situation. 

Par exemple :

1- Avez-vous besoin d'avoir un agenda clair de vos rendez-vous / actions ? Si oui, sur combien de temps à l'avance ?

2- Est-ce que les imprévus sur l'agenda vous dérangent ?

3- Avez-vous besoin d'avoir des objectifs, ambitions, projets sur lesquels vous projeter, construire votre quotidien ?

4- Savez-vous rapidement / facilement changer d'objectifs ou de projets ? 

5- Avez-vous besoin de savoir parce que vous n'aimez pas les flous, les incertitudes ?

Etc. J'ai construit une liste de 10 mécanismes, identifiés au fil des années, qui me permettent de mieux me comprendre mais aussi mieux comprendre mes proches qui fonctionnent différemment ! Il n'y a aucune bonne ou mauvaise réponse. Chaque mécanisme sera très utile pour certaines situations, plus gênants pour d'autres situations surtout si on n'en a pas conscience.

Sur ces 5 questions, pour moi, c'est OUI, NON, OUI, OUI, OUI !

C'est la question 5 qui m'a gênée sur cette blessure : impossible de savoir les délais des différentes étapes qui allaient suivre l'opération ! Or à la question 3, j'ai un gros OUI. Pas de problème pour m'adapter, changer, mais besoin de me projeter, besoin de savoir...


Les délais

Côté médical, personne, absolument personne n'a voulu s'avancer à me présenter des délais avant que je ne vois le chirurgien. Côté amis et judokas, j'ai eu tous les délais possibles et imaginables 😅De "tout de suite après, tu reprends !" à "plus de 2 ans...". Avec ça !

C'était donc un vrai challenge pour moi que d'essayer de retrouver le moral sans rien savoir de la sauce à laquelle j'allais être cuisinée. Mais j'ai apprécié ce défi : c'était intéressant et une super occasion de se découvrir.


Les bénéfices

La toute première étape que j'utilise toujours et qui est bien utile, c'est de me demander quels sont tous les bénéfices de cette situation. C'est bête mais cela m'a soulagée tout de suite en partie :

- je vais pouvoir regarder des films le soir,

- je vais faire des diners avec mes amis non judokas,

- je pourrais mettre à profit mon arrêt pour faire davantage d'interviews,

- peut-être que je pourrais faire de la blessure un sujet pour le blog...

Ça m'a aidée de faire cette liste. Mais ça n'était pas suffisant... C'est sur le trajet pour aller voir le chirurgien que j'ai eu un premier déclic énorme 😁


Perdre versus gagner


Un style de vie qui s'arrête

Pendant un peu plus de 48h, j'avais à l'intérieur cette énorme perte comme un grand vide soudain en moi et dans ma vie puisque je perdais :

👉🏾 mes compétitions à venir (donc mes objectifs),

👉🏾 mes entrainements du soir (mon équilibre, mon plaisir),

👉🏾 mais aussi mes voyages (mon style de vie)

👉🏾 et donc les rencontres de dojo en dojo (soit 50% de ma vie sociale).

J'avais l'impression qu'on m'arrachait la moitié du corps 😅

Ce n'était pas mon judo qui s'arrêtait mais tout mon quotidien ! D'ailleurs, j'ai dû annuler la suite de mon périple la mort dans l'âme (Toulouse, Figeac, Oléron, Niort...) et renoncer à voir des amis alors que j'attendais ça depuis longtemps.


Ma colonne vertébrale

Par dessus ça, j'étais inquiète : le judo est "ma colonne vertébrale", c'est ce qui me donne la ligne droite de mes journées et mes semaines. Tout le reste en découle. N'importe quel autre objectif ou projet, je sais l'accomplir avec discipline parce que j'utilise ma "forme de vie" que je construis par le judo. Si je n'ai plus la matière qui me construit, comment vais-je mener mes autres projets ? Et c'est là que le déclic s'est produit !

👉🏾La vie m'invitait à évoluer : j'avais l'opportunité extraordinaire de mener à bien mes projets avec discipline et ambition sans le judo ! J'allais devoir être inventive, chercher, tester, mieux me connaitre encore ! Mais j'en étais capable, c'était sûr !

👉🏾La vie me sentait prête pour m'enrichir et apprendre à être en bonne santé même sans judo, m'alimenter correctement même sans dates de pesée : c'était une "prise d'indépendance" parce que je le valais bien !

👉🏾La vie m'offrait de la place pour énormément de nouveautés : comme elle me connait bien ! Moi qui n'aime pas la routine... Ne serait-ce pas "trop facile" de continuer mes voyages tranquille de dojo en dojo ?

👉🏾La vie voulait que j'ai vraiment le choix en me proposant d'expérimenter la vie de sédentaire pendant un moment !


Merci pour le cadeau !

En fait, là où je voyais un "trou", une perte, soudainement apparaissait un CADEAU ! C'est vrai quand on y pense : le judo, je l'ai ! Tout ce que j'ai fait jusqu'à présent, depuis ma forme physique jusqu'aux progrès techniques, je l'ai ! C'est en moi et ça fait partie de mes forces ! Ça n'aura pas disparu dans 6 mois... !

En revanche, ce que j'aurai gagné dans 6 mois, c'est beaucoup beaucoup beaucoup de choses en plus. Je pourrai toujours choisir de repartir sur la route, de dojo en dojo... ou pas ! Je pourrai reprendre la compétition et mes entrainements, en mieux ! Je me serai enrichie de cette expérience et de nouveaux projets. Bref : comme toujours, il n'y a rien de bien ou de mal, il y a juste ce qui est chaque jour. Et vivre chaque jour est extraordinaire en soi ! Donc le chemin extraordinaire que j'ai entamé il y a un bon moment continue 😁

"La vie est parfaite"

Plusieurs phrases qui sont quasiment "ma religion" m'aident à avoir ce genre de déclic. 


👉🏾 "La vie est parfaite". J'en ai la conviction. Si je n'aime pas quelque chose, c'est que je n'ai pas encore trouvé comment regarder cette chose ! C'est que c'est moi qui suis à côté de la plaque 😅 Dans ce cas-là, je sais qu'il faut être patient, laisser le temps au temps, et à un moment, je vais voir ! En attendant, juste être prête à voir cette perfection quand elle apparaitra... 😉


👉🏾 "On ne sait pas ce qu'on ne sait pas". Quand quelque chose ne me plait pas du tout, comme cette blessure, j'aime bien m'imaginer dans 3 mois, 6 mois ou même peut-être 10 ans, en train de remercier le ciel de l'avoir eue parce que... je ne le sais pas encore justement ! Seul l'avenir me montrera ce que ça m'a apporté !


👉🏾 "L'important est qui tu deviens". Dès que je me concentre sur cette phrase, les faits deviennent un "terrain de jeu". Ils n'ont plus d'importance en tant que tels. Cela m'aide aussi à accélérer ma construction. Blessée, je me suis demandé qui je choisissais de devenir : quelqu'un d'aigri, triste et bloqué ou quelqu'un qui apprend et qui traverse la difficulté ? 


👉🏾 "C'est une chance !". Cela peut paraitre surprenant mais encore une fois, quand on est convaincu que la vie est parfaite, alors c'est aussi intéressant de penser à tout ce que cet évènement nous évite. Je me suis dit "Peut-être que ma blessure m'évite de vivre des défaites aux prochaines compétitions dont j'aurais eu du mal à me relever... Peut-être qu'elle m'évite une blessure bien plus grave plus tard... Peut-être qu'elle m'évite une lassitude qui m'aurait fait perdre le goût de la progression..." etc. Ce sont, par définition, des hypothèses, un exercice intellectuel. Mais ce mécanisme de réflexion permet de changer d'angle de vue et de re-situer, encore une fois, l'évènement comme ni bien ni mal.


👉🏾 "Papa". Enfin, je pense toujours à mon papa qui est là-haut, déjà parti de cette Terre. Il est parti vite, sa vie a été courte... Qu'est-ce que manquer quelques compétitions franchement ? "La vie est courte" peut paraitre une banalité et pourtant, quand je pense à papa, c'est vraiment ce que je ressens, très sincèrement. C'est comme si j'entendais sa voix pleine de la sagesse de l'au-delà : "ne t'inquiète pas, c'est pas grave... Soigne-toi, c'est le plus important".


Post-scriptum


Je peux être arrêtée un peu plus longtemps ?

En sortant du rendez-vous avec le chirurgien, je me suis inquiétée : ma période de reconstruction ne serait pas si longue que ça et en plus, j'allais finalement être pas mal occupée avec le kiné ! Pas sûre que j'ai vraiment l'opportunité de m'enrichir autant que je l'imaginais... J'étais presque déçue ! 😅


À bientôt pour d'autres larmes

Je reste lucide depuis la 1ère seconde de mes déclics : je sais qu'il y aura des moments plus difficiles, des coups de mou, des doutes peut-être. Je le sais et c'est normal. Ça ne me dérange pas d'ailleurs, ça fait partie de l'expérience.

Alors : suite au prochain épisode...

Je vais me préparer pour l'opération, la 1ère de ma vie !



* INJ : Institut National du Judo, à Paris. Les entrainements rassemblent essentiellement des juniors et seniors de haut-niveau, dont les judokas de l'INSEP qui peuvent venir s'y entrainer également.

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